Décryptage d’un bookworm.

Tout le monde le sait, les lecteurs sont des êtres à part. Ils sont enfermés dans un microcosme spécifique qui les fait parfois agir d’une manière très étrange. A travers certaines de leurs phrases préférées, étudions ces créatures particulières, voulez-vous ?

Le but de cette étude hautement scientifique (tousstouss) est de vous aider à mieux comprendre votre entourage. Si parmi celui-ci vous avez un lecteur (parfois aussi appelé  affectueusement bookworm), j’espère que ces quelques mises en situation vous aideront à gérer et à vivre de manière plus sereine. Mari, femme, père, mère, enfants, ami, soeur, cousin, cousine, voisin, collègue… peut-importe qui est le bookworm que vous fréquentez. Pour vous, je lève les voiles et mystères de son comportement ! (ui ui). Je vous propose donc un petit panel de phrases qu’on trouve couramment dans la bouche du bookworm, phrases que j’expliquerais et tenterais de décrypter pour vous. Je vous donnerais aussi des conseils pratiques pour gérer aux mieux ces situations sus-nommés, en espérant qu’elles vous aident à faire face …

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  • « Allez, encore un chapitre. »

Un classique. S’entend souvent vers 23h. Puis de nouveau à minuit. Et encore à 1h. Selon la qualité de la lecture, cette phrase peut être répétée à de nombreuses reprises avant de conclure d’un « olala, c’est déjà le matin ?? » étonné, prononcé d’une voix rauque et avec des yeux défoncés par le manque de sommeil. Dans ce cas là, il  ne sert à rien de s’énerver ou de faire remarquer que c’est chaque soir pareil. Faites preuve de compréhension et préparez du café.

  • « Je n’ai plus à rien liiiiire. » 

giphyUn autre classique. Souvent prononcé face à une PAL (pile à lire, je le précise pour les non initiés) qui fait quelques mètres de haut et contient plus d’une centaine d’ouvrages. Cette PAL représente tous les romans que le bookworm a acheté, admiré puis relégué dans un coin en promettant de les lire plus tard. Deux ans ont passés depuis et le roman est toujours là. Pour autant, il n’est pas envisageable de s’en débarrasser car, le moment venu, le bookworm aura besoin d’avoir le livre sous la main. Pour en revenir à notre exclamation apitoyée, elle signifie que le bookworm ne trouve pas chaussure à son pied parmi les livres qu’il a sous les yeux. Je précise qu’il est inutile de faire remarquer que la moitié des livres présents dans la pièce n’ont jamais été ouverts. Le bookworm le sait. Mais s’il vous dit qu’il n’a plus rien à lire, c’est qu’il n’a plus rien à lire. Pour calmer l’hystérie qui monte, proposez une sortie à la librairie du coin.

  •  » Bon, cette fois-ci, c’est décidé, je me mets en book buying-ban ! »

Cette volonté de ne plus acheter de livres pendant une période définie est un processus souvent enclenché mais rarement respecté. Cela ne signifie pas que vous, en tant qu’ami du lecteur, pourrez vous permettre de faire une quelconque réflexion si le book buying ban venait à être rompu.

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  • « Je vais juste regarder, je n’achète rien. »

Bien que prononcée d’un ton convaincu et ferme en entrant dans la librairie, cette phrase n’a aucune valeur morale et légale. Le lecteur n’est pas à l’abri d’une découverte, d’une redécouverte, d’un moment de faiblesse ou peut être victime de la stratégie de marketing des maison d’édition en succombant à la beauté d’une couverture. Vous qui accompagnez le bookworm, respirez à fond, regardez le farfouiller de partout et prenez votre mal en patience. Vous êtes là pour un moment. Encore une fois, il ne sert à rien de s’énerver en cas de craquage.

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  • « Tu m’accompagnes à Montreuil / Salon du Livre / brocante du coin / salon littéraire en tout genre / studios Harry Potter / tout autre parc à thème qui me rendra hystérique d’adulation ? »

Bien que cela ressemble à une demande, c’est en fait une supplique. Le bookworm sait qu’il vous demande beaucoup mais il a besoin de vous. Il est inenvisageable d’aller seul à de tel événement car le bookworm est, par nature, un être socialement timide. Il a donc besoin de soutien. Si vous acceptez, préparez-vous à beaucoup rire en voyant ses réactions devant les auteurs, à beaucoup faire la queue pour les dédicaces ou conférences, à supporter ses crises de fangirl, mais aussi, immanquablement, à porter ses affaires lorsque les livres deviennent trop lourds.

  •  » Il n’y avait rien dans la boite aux lettres ?! »

Généralement prononcée d’un air agacé, cette phrase signifie que le lecteur attend un colis qui contient un ou plusieurs livres. Le délai de livraison est pesant car l’attente, bien qu’excitante au début, commence à devenir anxiogène. Le colis s’est-il perdu ? Le livre va-t-il bien ? A ces inquiétudes tout à fait légitimes, il faut ajouter l’impatience de découvrir le roman ou les romans commandés. S’il s’agit d’une suite de saga, cette impatience peut tourner à l’obsession et se traduire par une agressivité qu’il conviendra d’excuser.

  • « J’AI UN COLIS ?! »

A l’inverse de notre précédent exemple, cette exclamation sera faite d’un ton joyeux, à la limite de l’hystérie. Reculez-vous, laissez au bookworm la place d’ouvrir son colis, de découvrir ses livres, de les caresser et de les sentir. Nul besoin de préciser qu’il ne faut pas s’offusquer ou trouver étrange un tel comportement. Contentez-vous de partager la joie du bookworm et ne touchez pas les livres avant d’en avoir eu l’autorisation.

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  •  » Ce que je veux pour Noël / Hanouka / mon anniversaire / ma fête / mon bac / mon mariage / la naissance de mon enfant ? DES LIVRES. »

Comprenons-nous bien : tous les bookworms savent à quel point cette situation est frustrante pour leurs proches. Ils savent que cela vous énerve de devoir offrir des livres, années après années, fêtes après fêtes. Ils savent que, pour une fois, vous auriez aimé offrir un bijou, du parfum, un jeu vidéo. Ils savent mais n’en ont cure. Le principe premier d’un cadeau est de faire plaisir. Un bookworm aime lire. Un bookworm aime donc les livres. Pour lui faire plaisir, il faut donc lui offrir des livres. CQFD. Il ne sert à rien de s’énerver, de soupirer ou de demander « tu es sûr ? tu ne veux pas autre chose pour une fois ? ». Il est sûr. Il ne veut pas autre chose. Respirez donc à fond et acceptez le fait que vous êtes condamnés à acheter des livres jusqu’à la fin de votre vie (pensez à prendre une carte de fidélité à la librairie). Aborder le thème des cadeaux me pousse à faire une digression, courte mais néanmoins capitale. Sachez que le chemin le plus court vers le coeur d’un bookworm passe par l’achat d’un livre. Que vous vouliez initier une relation romantique, vous faire pardonner une erreur, raviver la flamme ou simplement faire preuve d’affection, oubliez les roses et restaurants. Le livre est la solution. Veillez néanmoins à éviter les faux pas en sélectionnant un roman de la wishlist du bookworm.

  • « Euuuh tu fais ton Sirius Black là. »

Peut aussi fonctionner avec tout autre référence obscure à un roman / saga que vous n’avez pas lu et dont vous n’avez même jamais entendu parler. Je ne peux malheureusement pas vous décrypter toutes les expressions et références utilisées. Sachez juste que, dans le cas présent, on vous accuse d’être une drama queen, d’over-react et d’avoir le sens du spectacle. Dans tous les cas, il est inutile de faire remarquer au bookworm que vous ne connaissez pas cette référence / blague. C’est même hautement déconseillé car cela reviendrait à lui avouer que vous n’êtes pas familier d’un univers qu’il adore et pourrait provoquer soit une réaction violente, soit une rupture franche et totale de vos relations. Si, au contraire vous connaissez la référence, clamez le haut et fort, mais de manière subtile. Ne dites pas « ah ! Harry Potter ! Je connais ! ». Dites plutôt « si je suis Sirius Black, tu es un vrai Dumbledore ! ». A noter que je décline toute responsabilité quant à la réaction entraînée par une telle réponse : hystérie, pleurs de soulagement d’avoir trouvé quelqu’un à qui parler …

  • « Cette couverture est tellement belle … « 

Malgré son intérêt pour les livres et leur contenu intellectuel, le bookworm a ses penchants superficiels. Une belle couverture aura toujours raison de lui et peut être un critère décisif en cas d’hésitation entre plusieurs possibilité d’achats. Faire remarquer qu’on ne juge pas un livre d’après sa couverture ou que cette exclamation est très superficielle ne sert à rien, sinon à énerver le bookworm qui se sentira insulté dans son âme de lecteur. Contentez-vous donc de hocher la tête et, si ce n’est pas au dessus de vos forces, renchérissez d’un subtil « j’avoue, magnifique ! ». Sachez aussi que cette phrase est souvent annonciatrice d’un achat que vous vous devez naturellement d’encourager.

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  • « Regarde ! Le tome 3 est d’occasion ! Je n’ai pas lu les deux premiers mais bon … à ce prix là, ça ne se refuse pas ! »

Nous nous accordons tous pour dire que ce raisonnement est illogique au possible. Le bookworm pourrait très bien ne pas aimer les premiers tomes ou mettre des années à les lire, ce qui rendrait cet achat impulsif totalement caduc. Néanmoins, en laissant passer cette occasion, il prend un risque bien plus grand : ne plus trouver ce troisième tome d’occasion et regretter toute sa vie d’avoir hésiter. N’essayez donc pas de le raisonner et contentez-vous d’approuver, si possible avec une phrase type « évidemment que tu dois le prendre, c’est une occasion en or ! ».

  • « J’ai passé une mauvaise journée, je vais m’acheter un livre pour me réconforter. / J’ai passé une excellente journée, je vais m’acheter un livre pour terminer en beauté. »

Mon explication ici sera aussi brève que mon conseil. Tout est prétexte à acheter un livre. TOUT. Il est donc inutile de chercher une logique et plus encore d’essayer d’éviter ça. Faites vous à l’idée.

  •  » Je ne peux pas sortir, j’ai plein de choses à faire … On reporte ? »

giphy (1)Ce n’est pas toujours le cas, mais cette phrase annonce souvent que le bookworm est en plein dans une lecture qu’il peine à lâcher. Ne soyez pas vexé si cela signifie qu’il préfère lire plutôt que de passer du temps avec vous. Ce n’est pas personnel, mais bel et bien un sortilège lancé par les romans au moment de l’ouverture et du début de la lecture. Le glissement des pages devient hypnotique et le bookworm est comme ensorcelé. Il reviendra à lui quand le roman sera terminé, n’ayez crainte. Ne lui en tenez pas rigueur et faites semblant de croire l’excuse qu’il vous donne, même s’il s’agit de faire une lessive ou d’attendre la fin d’une mise à jour sur l’ordinateur. NB : cette situation est valable en cas de retard. Peut-être que le métro avait des problèmes, ou peut-être que le chapitre était trop bon … Allez savoir !

 

  • « Bon, ok c’est ma troisième édition de ce roman … mais quand on aime on ne compte pas, pas vrai ? »

Pour éviter toute situation de discorde, sachez que la réponse à cette question est toujours oui. Oui, il est naturel de vouloir une quatrième édition d’Harry Potter. Oui, il est naturel de commander le coffret collector qui vient de sortir. Oui, c’est compréhensible et même très raisonnable d’avoir quatre fois tous les romans de Rick Riordan. Oui, c’est naturel d’avoir des éditions en allemand même si on ne comprend pas un mot de cette langue. La beauté des couvertures est un langage universel.

  • « Ouais, ouais, c’est bientôt les soldes. Tu parles, pour ce que ça apporte … »

Cette phrase, prononcée avec beaucoup de rancœur montre bien que, législation ou non, loi Lang ou pas, le bookworm ne digère par d’être privé de réductions saisonnières sur ces biens préférés. Conscient, en son fort intérieur, de la beauté de la protection mise en place, il pleure néanmoins sur les économies envolées à chaque passage en librairie. Il envie les adeptes du maquillage, des vêtements ou des jeux vidéos qui, eux, profitent comme il se doit des semaines où les prix cassés se font concurrence les uns aux autres. Face à sa douleur, n’essayez pas de raisonner le bookworm, contentez vous de le consoler. Si vous voulez à tout prix exercer un argument logique, faites valoir que toute économie faite sur l’achat de vêtement ou tout autre bien de consommation induit plus d’argent pour acheter des livres.

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  • « J’ai mal au dos … tu portes mon sac, s’il te plait ? »

Pour comprendre cette phrase, il est nécessaire de faire une petite mise en situation, à laquelle il existe plusieurs variantes. Soit le bookworm a assuré être capable de porter les 6 livres achetés lors de ce passage en librairie durant lequel il ne devait rien acheter (voir plus haut). Soit vous avez décidé d’une petite balade et, par peur de s’ennuyer autant que par réflexe, le bookworm a décidé de prendre sa lecture en cours. Soit le bookworm que vous fréquentez est aussi bookstagrameur et a cette manie de toujours prendre des livres partout où il va, dans l’espoir de parvenir à prendre une photo en extérieur qu’il pourrait poster sur ses réseaux. Dans tous les cas, il est inutile de faire remarquer que s’encombrer n’était pas nécessaire et encore moins de lancer un « je te l’avais bien dit ! » sonore. Respirez à fond, soyez chics et portez un peu le sac.

  •  » Cherche pas, ce personnage, c’est l’homme / la femme de ma vie. »

Extrêmement connu et très répandu, le syndrome du bookboyfriend / bookgirlfriend (ou petit ami(e) fictif) sera notre dernier exemple, mais pas des moindres. Cette phrase est souvent prononcée quand le bookworm a trouvé l’homme / la femme parfaite dans un roman / saga. L’affection naturelle qu’on peut ressentir pour un personnage tourne alors à l’obsession et peut être effrayante pour les non initiés. A savoir que l’appropriation de l’affection d’un personnage fictif engendre des conflits réguliers et sanglants qui peuvent réduire à néant une amitié naissante. Il convient donc d’être prudent lors de toute prise de position. Encore une fois, il est bien évidemment inutile de rappeler au bookworm que ce personnage qu’il/ elle adule est fictif. C’est même cruel d’insister sur ce point alors que tout ses efforts sont dirigés vers l’oubli de ce détail, inconvénient mineur dans la relation que le bookworm et le personnage entretiennent. Le mieux est de se feindre l’intérêt pour ledit personnage : comment va-t-il ? Où comptez-vous partir en vacances cet été ? Se remet-il des aventures qui lui sont arrivées dans le dernier tome ? Ne lésinez pas sur les détails : cela fera plaisir au bookworm de voir que vous prenez son délire à coeur. Petite et dernière précision : si, par malheur, le bookboyfriend a connu une fin tragique au cours du roman / de la saga, il est absolument interdit de mentionner le sujet. Cela ne servirait à rien et pourrait mettre le bookworm dans un état d’hystérie catastrophique. Laissez-le être dans le déni et faites semblant de croire la fable qu’il vous sert, même si elle implique un complot mené par les auteurs et un élevage de kiwis en Nouvelle-Zélande (oui, je fais référence à la nouvelle vie cachée de Finnick Odair, un problème peut-être ?).

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J’espère que ces quelques conseils et décryptages vous aideront à mieux vivre une quelconque relation avec un bookworm. J’ose espérer que vous trouverez du sens à mes explications et que, à travers elle, vous serez le parfait confident dont rêve tout bookworm. Si vous êtes vous même un bookworm, vous êtes-vous reconnus dans ces phrases ? Dans ces situations ? Dans mes explications ? 😉 Si, par mégarde ou négligence, j’ai oublié une phrase qui vous parait culte, surtout n’hésitez pas à m’en faire part !

Marie  ❤


50 réflexions sur “Décryptage d’un bookworm.

  1. Coucou !
    C’était très drôle et je me suis parfaitement reconnue dans ces situations et la référence à Sirius Black a activé mon mode Fangirl XD
    Merci beaucoup pour ton super article, je crois que je vais le faire lire à mon entourage !
    Bon allez, je file lire un chapitre de ma lecture en cours avant de dormir. Juste un chapitre, promis !

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  2. Je t’accorde 10 ans d’immunité pour cet article ô combien véridique 😉
    Je ne me suis pas reconnue en revanche dans le sac rempli de livres en cas de photos xD j’en ai toujours un dans mon sac, suffisant pour réconforter même si je ne peux pas l’ouvrir de la journée ❤ – ❤
    Bravo 😉

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  3. Cet article est juste LA définition du bookworm à lui tout seul ! Je dis chapeau ! Merci de nous avoir si bien cernés Marie ♥ Je m’y reconnais tellement que cela me permet de beaucoup moins culpabiliser par rapport à toutes mes « irrationalités ». Cependant, je peux me targuer de respecter mon book buying-ban depuis avril et donc de ne pas craquer lorsque je me rends en librairie ! Si, si, je suis un être surnaturel ! Par contre, le « J’ai reçu un colis ??!! », c’est totalement moi ! Les pertes de la Poste, c’est la pire chose au monde !!

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